Témoins du harcèlement : héros ou complices involontaires ?
La place des témoins : comment briser la loi du silence ?
Le harcèlement scolaire est un phénomène qui ne se joue jamais à huis clos. Outre l’agresseur et la victime, il y a un troisième acteur clé : le témoin. Trop souvent silencieux, paralysé par la peur ou l’indécision, il devient malgré lui un complice passif. Pourtant, il détient un pouvoir immense : celui de briser le cycle du harcèlement.
En tant que parents, enseignants ou professionnels de l’accompagnement, notre rôle est de donner aux enfants les clés pour agir en toute sécurité, sans se mettre en danger.
La pression sociale et la peur des représailles : ce que ressentent les témoins
Les témoins de harcèlement sont pris entre plusieurs feux :
- La peur de devenir la prochaine cible
- L’influence du groupe et la peur de l’exclusion
- Le doute : est-ce vraiment du harcèlement ou juste une plaisanterie ?
- L’impression que personne n’écoutera ou n’agira s’ils parlent
Les enfants sont sensibles au regard des autres et redoutent d’être rejetés par leur groupe s’ils interviennent. Ils peuvent aussi être victimes d’un phénomène appelé « diffusion de responsabilité » : chacun pense que quelqu’un d’autre va agir… et au final, personne ne le fait.
Dans Spoutnik et Léa, Léa traverse cette épreuve en silence. Elle voit bien que certains camarades hésitent à intervenir, mais personne ne prend réellement position. Ce silence renforce l’isolement de la victime et permet au harcèlement de continuer.
Comment donner aux témoins les outils pour agir sans danger ?
Un témoin qui n’agit pas n’est pas forcément lâche ou insensible : il manque souvent de repères et de solutions. Voici des stratégies simples et accessibles que nous pouvons enseigner aux enfants pour qu’ils deviennent des « témoins actifs », sans se mettre en péril :
1. Intervenir collectivement
Un témoin seul hésite, mais un groupe peut faire bloc. Encourager les enfants à se soutenir entre eux et à intervenir en groupe réduit les risques de représailles.
Exemple inspiré de Spoutnik et Léa : dans l’histoire, Léa aurait pu être protégée plus tôt si plusieurs camarades avaient formé un groupe de soutien. Plus ils sont nombreux à s’opposer au harcèlement, moins le harceleur se sent en position de force.
2. Jouer la carte de la distraction
Sans affronter directement l’agresseur, un témoin peut briser la dynamique en détournant l’attention. Il peut, par exemple, interpeller la victime :
« Hé, tu veux venir avec nous ? »
« Tu as vu ce que le prof a écrit au tableau ? »
Cette simple manœuvre peut suffire à interrompre l’attaque et à extraire la victime du piège.
3. Signaler sans culpabiliser
Parler à un adulte ne signifie pas être une « balance ». Il faut déculpabiliser les enfants en leur expliquant que signaler un harcèlement, c’est protéger quelqu’un, pas trahir.
Exemple inspiré de Spoutnik et Léa : dans le livre, Léa hésite à parler car elle pense que personne ne l’écoutera. Mais lorsqu’elle ose enfin s’exprimer, les choses commencent à changer.
Les écoles peuvent aussi mettre en place des boîtes à messages anonymes pour que les témoins puissent s’exprimer sans crainte.
4. Soutenir la victime en privé
Même si un témoin n’ose pas agir sur le moment, il peut faire une énorme différence après coup.
« Ça va ? J’ai vu ce qui s’est passé… »
« Je suis là si tu veux parler. »
Dans Spoutnik et Léa, l’arrivée d’un allié est un tournant majeur pour Léa. Un simple message de soutien peut redonner confiance à une victime et l’encourager à parler.
Témoignage : Quentin, 13 ans, a osé agir… et a changé la donne
En tant que professionnel de l’accompagnement, j’ai reçu Quentin, 13 ans, en consultation après une intervention courageuse qui l’avait marqué.
« J’ai vu un garçon de ma classe, Théo, se faire insulter et pousser tous les jours. Personne ne disait rien, moi non plus. Mais un jour, ils ont vidé son sac par terre et déchiré son carnet. Je ne pouvais plus regarder sans rien faire. Je suis allé voir la CPE et j’ai écrit un message anonyme dans la boîte de signalement de l’école. Le lendemain, les surveillants sont venus parler à Théo et aux autres. Je n’ai pas été découvert, et Théo a enfin osé dire ce qu’il subissait. Depuis, ça s’est calmé. »
Quentin pensait que son geste serait inutile, qu’il ne changerait rien. Pourtant, il a permis à un camarade d’être entendu et soutenu.
Pourquoi l’intervention des témoins est un levier puissant
- Les agresseurs cherchent du public : sans spectateurs passifs, le harcèlement perd de sa force.
- La parole des témoins est souvent plus crédible que celle de la victime, qui peut être perçue comme « trop sensible ».
- Un climat scolaire bienveillant se construit avec des enfants qui osent intervenir, et non en blâmant ceux qui se taisent.
Dans Spoutnik et Léa, c’est grâce à une prise de conscience que Léa finit par trouver un chemin vers la résilience. De la même manière, chaque enfant peut jouer un rôle déterminant, simplement en brisant le silence.
Et maintenant ?
Pour les parents et professionnels : utilisez Spoutnik et Léa pour ouvrir la discussion avec les enfants.
Posez-leur ces questions :
- As-tu déjà été témoin de harcèlement ?
- Que ressens-tu quand tu vois quelqu’un se faire moquer ?
- Que pourrais-tu faire différemment la prochaine fois ?
Découvrez le livre de Spoutnik et Léa sur mon site : www.stephanerallier.fr/spoutnik-et-léa
Encourageons nos enfants à devenir des témoins actifs et responsables. Leur voix, même discrète, peut être la clé pour libérer une victime du silence.
Et vous, comment pouvez-vous aider un enfant à devenir un témoin actif ?
